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Des travaux et des jours à Avezac

A l’instar de bien des auteurs de topographies destinées à la Société royale de médecine, Picqué soigne le style de ses écrits, engageant quelquefois sa plume dans des méandres littéraires, cependant, bien qu’il suive le canevas classique de ce genre d’écrits, il ne tombe jamais dans le schématisme et ne pèche que rarement en accusant les traits d’une réalité quotidienne difficile ou en se faisant par trop moraliste . Privilégier le regard d’un observateur appelle une interrogation sur sa position tant sociale que culturelle à l’intérieur de la communauté dans laquelle il évolue : membre d’une famille d’hommes de loi qui montrent leur éloquence au parlement de Toulouse, Picqué occupe une position sociale qui le distingue de la majorité des Avezacais et possède, outre une solide culture classique qui lui permet de citer au détour d’une phrase la vingt-quatrième lettre du premier livre de la correspondance de Pline le Jeune, de réelles compétences médicales (il maîtrise des travaux déjà anciens, tels ceux de Pringle et connaît suffisamment les conclusions plus proches de Tissot ou celles toutes récentes de Zimmerman, dont les principaux travaux, parus en allemand dans les années 1760, n’ont été publiés en français qu’en 1774, pour se permettre de les évoquer dans un écrit destiné aux sommités parisiennes) ; néanmoins, cette culture hors norme n’empêche pas le médecin d’Avezac d’être un homme de son village et de noter, à côté des observations scientifiques, et en usant parfois de ses propres mots, le sentiment qu’éprouve un « nous collectif » sur les banalités qui, tels la pluie et le beau temps, structurent le quotidien. En dépit de leur richesse les observations de Picqué ne sauraient suffire à une approche éco-anthropologique d’Avezac, aussi les minutes notariales et les archives de la communauté apportent-elles un complément précieux. Placé dans un écosystème complexe, les Avezacais composent journellement avec les autres facteurs afin d’assurer le maintien de leur société sur un âpre terroir ; plus qu’une lutte, c’est une tâche digne d’un Sisyphe car l’équilibre entre la communauté et la « nature » est impossible : les champs ne rapportent que grâce à un travail acharné et les villageois, malgré la vigilance du médecin et plus encore leur foi en un Dieu dont le temple occupe une place fondamentale dans l’espace quotidien, ne sont jamais à l’abri d’une maladie ou d’un mauvais orage.

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